Le symbole de la Bretagne partout dans le monde est la crêpe accompagnée d’une bolée de cidre. Les crêperies ne sont pas en nombre au niveau des pizzerias mais leur développement est constant.
Pourquoi la galette fine de blé noir est-elle devenue le symbole de la cuisine bretonne ?
Sous forme de grains ou de farine, le sarrasin, sans gluten, riche en protéines végétales, en fibres et en antioxydants, possède des vertus hautement nutritives reconnues aujourd’hui et mises en avant. La mode du sans gluten lui assure un développement accéléré. Mais le sarrasin a failli disparaître ! Si en 1960 , on comptait encore 116 000 hectares de culture de blé noir, en 1980, on en dénombrait pas plus de 200. En 2010, les surfaces bretonnes cultivées avec du blé noir tournent autour de 3 000 à 4 000 hectares et grâce à l’appellation IGP « blé noir breton » va poursuivre son expansion.
Le blé noir a été lié à l’histoire de la Bretagne. D’origine asiatique, l'étrange plante, cousine de l’oseille et de la rhubarbe est arrivée en France par la route des Celtes. Des traces de pollen de sarrasin dans des tourbières en Bretagne attestent de sa présence dès le XIIème siècle. Elle portait une graine dont la forme évoquait celle de la graine du hêtre; mais sa couleur noire lui valut le nom de sarracenus (signifiant peuple arabe selon les croisés durant le Haut Moyen Âge) finalement dit Sarrasin (peuple). Il a été imposé par la Duchesse Anne au XVème siècle, désireuse d’assurer les récoltes même aux plus démunis de son royaume, et de contempler son duché couvert de jolies fleurs blanches et rosées. Les paysans y trouvèrent alors une triple aubaine, car la plante demandait peu de travail et était peu taxée (s’accommodant de terrains peu fertiles, contrairement au froment qui réclamait de grosses dîmes). De plus le sarrasin donne récolte au bout de 3 mois, ce qui lui vaut le surnom de « plante des cent-jours ». De nombreux pauvres se nourrissaient de bouillies et de galettes, en écrasant les graines transformées en farine. À cette époque, le critère de luxe et d’abondance était celui de manger des crêpes plusieurs fois par jour, droit seulement réservé aux seigneurs.
Sa culture se développe rapidement, tant il se plaît dans les terres pauvres, humides et acides. Si ses rendements sont irréguliers et assez faibles, il n'est pas taxé, il pousse sur des sols pauvres, et permet une récolte en trois mois, ce qui lui vaut le surnom de « plante des cent-jours » .
Sa culture se développe rapidement, tant il se plaît dans les terres pauvres, humides et acides. Si ses rendements sont irréguliers et assez faibles, il n'est pas taxé, il pousse sur des sols pauvres, et permet une récolte en trois mois, ce qui lui vaut le surnom de « plante des cent-jours » .
Les Hollandais, puis les Anglais découvrent le sarrasin au XVIIème siècle et l’appelle « buckwheat ». En France, la Normandie, le Massif central et le Limousin le portent alors aussi sur leurs terres en cultures et il se répand donc tranquillement dans les assiettes aux différents coin de France.
La fabrication de crêpes de froment (gwinizh, crêpe de blé tendre) et de galettes de blé noir à base de sarrasin (gwinizh du, ed-du) à l'aide d'une plaque sans rebord (bilig), est plus délicate qu'avec une poêle et décourage souvent le novice. Les premières biligs (crêpière ronde en fonte, utilisé pour cuire les galettes de sarrasin; dans certaines régions de la France on l’appelle aussi galettière, galétoire ou tuile) sont apparues au XVIème siècle.
La bilig était à l'origine une pierre ronde, donnant son étymologie à l'appareil, ou une plaque en terre cuite. Aujourd’hui, elle existe avec chauffage au gaz ou à l’électricité.
Femme qu’on dit bonne crêpière mène mari à sa manière !
Je suis obligé de citer Pierre-Jakez Hélias dans « Le cheval d’orgueil » :
« Cependant, à la maison, les femmes s’affairaient à préparer des crêpes pour tout ce monde. Et, croyez-moi, il en fallait plus de douzaines qu’il n’y avait de marres en action. On devait attendre son tour pour se remplir la panse. Les vieux mangeaient d’abord, puis laissaient les bancs aux jeunes. Parmi les crêpières, il y avait toujours quelques filles de bonne tournure, choisies par la maîtresse de maison pour l’agrément des gars. Ceux-ci ne manquaient pas de plaisanter avec elles et de les serrer d’un peu près. »
« Avec la farine du même blé noir, nous avons de quoi espérer des piles et des piles de crêpes ou de galettes. Le froment, dont nous avons tout de même quelques mesures, nous en promet aussi. Que demander de plus ! »
« ...elle essuie la galettière et la graisse avec le lardig, un torchon qui repose dans un vieux bol garni d’un mélange de saindoux et de jaune d’œuf. Tout est prêt. Une dernière fois, elle passe l’index dans la pâte pour s’assurer qu’elle est à la bonne consistance. Avec une louche de bonne dimension, elle puise la pâte et la fait couler au milieu de la tuile chaude. De son autre main, elle l’étale avec un petit rateau de bois appelé rozell. La pâte fait exactement le tour de la galettière et son épaisseur est partout la même. Elle commence à cuire. Alors, ma mère lâche le rozell pour attraper une longue râclette de bois, la spanell, avec laquelle elle détache la galette de la tuile en commençant par les bords. C’est le moment difficile. Avec la spanell engagée entièrement sous la pâte, il s’agit de retourner l’énorme galette d’un seul coup et de manière qu’elle retombe exactement à l’envers sur la plaque, sans quoi elle s’écrase en d’horribles rouleaux de pâte molle qui font lever le cœur et monter au front de l’opératrice le rouge de la honte. Quand la première galette est cuite, elle est cueillie vivement par la spanell et jetée sur une grande serviette étalée auparavant sur la table. Elle servira de tapis pour recevoir les suivantes qui seront beurrées abondamment par la providentielle spanell. »
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