vendredi 16 novembre 2018

7. Les petits métiers d'hier aujourd'hui disparus... : la décompteuse et le rebouteux

 
 
 
 
 
Pour certains petits maux, on préfèrait s’adresser aux rebouteux et aux guérisseurs.
 
Les guérisseurs, ou plutôt les guérisseuses n’ont rien à voir avec les illuminés ou avec les guérisseurs pseudo-scientifiques. Leur don est plus traditionnel. Ce sont celles que l’on appelait diskanterezed, c’est-à-dire, les « décompteuses ».
 
 
 
On a vu que le don de diskanter était accordé aux enfants nés les pieds devant. Cependant, une initiation était nécessaire. La guérison s’obtient en effet par la récitation exacte de formules et l’exécution de gestes bien précis. La moindre erreur rend nulle la tentative. Chaque diskanterez ne peut guérir qu’un nombre limité d’affections, d’ailleurs bénignes. 
 
La plus courante est celle qu’on appelle le telou deñved, sorte d’eczéma qui s’étend aux mains et aux avant-bras. Il fallait réciter trois fois de suite une formule sans prendre sa respiration, en faisant des signes de croix sur le mal avec une pièce d’argent.
Telou deñved, teh, teh,
N’e ket ama’ma da leh
Nag ama nag e neb leh
Etre nao mor ha nao mene
Eno’ma da wele
Telou deñved, va-t’en, va-t’en
Ce n’est pas ici qu’est ta place
Ni ici, ni nulle part
Entre neuf mers et neuf montagnes
Là est ton lit
 
 

Il y avait jadis dans toutes les communes des rebouteux, spécialisés dans la remise en état des articulations foulées et des os cassés, chez les bêtes comme chez les gens. Un enfant se casse-t-il la jambe ? On l’emmène directement chez le rebouteux, sans songer une seule fois à le présenter au médecin. C’est seulement si les soins reçus ne se révèlent pas efficaces qu’on s’adressera à ce dernier.



«  Avec les saints guérisseurs, il faut croire, c’est entendu, sinon ce n’est pas la peine. Les simagrées et les formules des « vieilles commères » et des « camelots de santé » ne sont pas autre chose que de la superstition ou de la sorcellerie de pacotille, mais rien n’empêche d’y aller voir, ne serait-ce que pour en rire. Et le rire fait toujours du bien. Les rebouteux savent leur métier et le font bien s’ils sont assez raisonnables pour ne pas en sortir. Et si vous êtes gravement malade, si vous avez un peu d’argent, faites venir un monsieur médecin. Voilà ce qu’assure Alain le Goff. » 
Pierre-Jakez HÉLIAS «  Le cheval d’orgueil » 


«  Pour les membres cassés, les foulures, les entorses, on préfère aller voir un rebouteux. Dans le canton, il y en a plusieurs, plus ou moins avoués. En général, ce sont des meuniers. Ces gens-là, dont le métier est d’endosser des sacs de grains très lourds, connaissent de père en fils les manières de remettre les os et les muscles en place. Quand ils n’y parviennent pas, il faut monter dans un char-à-bancs pour aller à Quimper un jour de foire. Là-bas, autour de la Place des Chevaux Gras, hors des murailles de la vieille ville, deux ou trois rebouteux célèbres reçoivent les méhaignés dans des arrière-salles de cafés. Jamais ils ne ratent leur coup. » 
Pierre-Jakez HÉLIAS «  Le cheval d’orgueil »



 
 
«  Les rebouteux, bien entendu, s’occupent aussi des animaux. Dans notre église, nous avons un saint protecteur des vaches et des chevaux. C’est saint Herbot, qui a sa statue à droite du chœur. Mais saint Herbot, s’il peut empêcher le mal d’arriver, ne le guérit pas souvent quand il est fait. Et les animaux sont bien précieux. Surtout les chevaux. Il y en a qui leur donnent une tranche de pain de seigle à dix heures pour leur faire un bon estomac. On dit aussi que, s’ils ont la diarrhée, il faut les conduire dans la paroisse voisine, jusqu’à la place de l’Eglise. » 
Pierre-Jakez HÉLIAS «  Le cheval d’orgueil »
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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